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A la rencontre de nos œnologues

Pour l’œnologue, les années se suivent et ne se ressemblent pas, ou presque. En effet, le travail de ce spécialiste de la «fabrication» du vin, qui contrôle et préside aux vinifications et assemblages, s’inscrit dans l’invariable rythme des saisons. A la Cave de Genève, ils sont deux à pratiquer ce métier : Florian Barthassat, 44 ans, en charge des vins rouges, et Patrick Gräzer, 51 ans, spécialiste des blancs et rosés. De janvier à décembre, du cep à la bouteille, ces artisans, comme ils aiment à se définir, accompagnent le vin de bout en bout. «Souvent, les gens réduisent ce métier à la cave, à la réception du raisin et à sa transformation en vin. Mais, à la Cave de Genève, nous travaillons avec plusieurs fournisseurs de raisins et nous nous obligeons à suivre tout le parcours. On vit avec la vigne tout au long de l’année», assure Patrick Gräzer.

Florian Barthassat et Patrick Grazer

Du printemps à Noël

Dès mars, les œnologues de la Cave visitent les parcelles, observent la floraison, puis la nouaison (moment où la fleur devient fruit), et la véraison (quand le grain de raisin gonfle et prend sa couleur). Avant la récolte, ils observent et goûtent régulièrement les raisins. «Notre métier reste très tactile et sensoriel», confirme Patrick Gräzer. Puis, ils prélèvent des échantillons pour sonder, analyser et quantifier les taux de sucre et d’acidité. Ces opérations permettent aux œnologues de préparer et de définir le calendrier et l’ordre des vendanges qui est différent pour chaque millésime. En effet, il dépend pour une partie des conditions climatiques. «Quand il y a des accidents, gel ou grêle, c’est compliqué», confirme Patrick Gräzer. Vignerons et œnologues avancent alors main dans la main. Les attentes, de part et d’autre, sont équilibrées et complémentaires. «Même avec un beau raisin, l’œnologue peut faire du vinaigre, et, inversement, il peut aussi sauver une récolte», relève Florian Barthassat.

La période des vendanges, à la fin de l’été, est la plus dense pour les œnologues. «Le raisin  nous est amené et c’est là que le métier stricto senso commence», continue Patrick Gräzer. En effet, les œnologues président à la transformation du raisin et aux différentes fermentations. «A la Cave de Genève, on a la chance de rentrer beaucoup de raisins et de vinifier dans différentes cuves, ce qui nous permet de pouvoir faire des essais, de changer des paramètres et d’essayer de nouvelles choses car on a plusieurs cuves. Très stimulant», témoigne Patrick Gräzer. 

De l’automne à Noël, les vins sont stabilisés. Suit alors la filtration et la mise en bouteille à la cave. Au long de ce processus, les œnologues doivent maîtriser les procédés chimiques et théoriques acquis lors de leur formation. Florian et Patrick sont passés par le centre de Changins qui dispense plusieurs cursus dans le domaine de la viticulture. Mais, le nerf du métier reste l’analyse sensorielle. «Notre outil principal, c’est notre palais», confirme Florian Barthassat.

Goûter, déguster et apprécier

La dégustation reste pour ces professionnels de la vigne un exercice quotidien et essentiel. «On déguste tous les jours», confirment en cœur les œnologues de la Cave de Genève. L’un et l’autre goûtent le raisin, le moût, le vin à la cuve et en bouteille. Régulièrement, ils participent à des sélections, à Genève, en Valais ou en Suisse pour mettre les vins de la Cave dans un contexte plus général.  «Je goûte nos vins souvent chez moi pour avoir une autre appréhension. Et je déguste le plus possible les autres régions pour ouvrir les chakras », confie Florian Barthassat. Les dégustations sont aussi l’occasion pour les œnologues de se retrouver «entre quatre yeux et deux palais, raconte Patrick Gräzer. Histoire de ne pas se laisser enfermer sur ses propres sensations.»  Pour autant, ces professionnels restent capables, l’un et l’autre, d’apprécier un bon vin tout simplement, «comme un buveur épicurien», confirme Florian Barthassat, grand amateur de Pinot Noir de Bourgogne, alors que de son collègue avoue un faible pour le Sauvignon. 

Compétences, expérience, curiosité

L’amour et la passion du vin est fortement présente chez Patrick Gräzer et Florian Barthassat. Ce dernier est d’ailleurs petit-fils et neveu de vigneron. Mais cela ne suffit pas pour devenir œnologue. Aux compétences acquises lors de la formation, s’ajoute l’expérience du terrain. «Il faut passer par toutes les étapes de la profession. C’est très important d’avoir les deux mains dans le raisin», confirme Florian Barthassat. «A un jeune, je conseillerais de faire des stages», ajoute Patrick Gräzer. C’est d’ailleurs comme cela que l’un et l’autre ont mordu: stages, jobs d’été chez les maraîchers, vendanges. «L’aspect intuitif est très important», affirme Florian Barthassat. Or, l’intuition se nourrit de l’expérience, «le capital le plus important de notre métier», assure l’œnologue. Cette expérience permet de réduire l’anxiété du professionnel qui doit travailler avec un produit vivant, soumis au pire mais aussi au meilleur. Le bonheur est alors pour ces hommes de la vigne et de la cave de voir pétiller les yeux de ceux qui dégustent le fruit de leur travail, ou, comme Florian Barthassat, «d’avoir du plaisir simplement, à titre personnel, de boire ce qu’on a élaboré.»

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